Recouvrement de créances : saisie des titres de société détenus par le débiteur

17 mai 2022

En matière de règlement forcé, la saisie sur compte bancaire ou sur salaire est courante.  En revanche, il est plus rare de procéder à la saisie des titres de société détenus par le débiteur. Pourtant, ce procédé d’exécution peut, en pratique, s’avérer très contraignant. Au point de forcer le débiteur saisi à procéder spontanément au paiement de sa dette !

Aperçu du mécanisme et des conséquences qu’une telle mesure d’exécution peut engendrer.

La saisie des actions ou parts sociales : une procédure efficace pour recouvrer ses créances impayées

D’une manière générale, la saisie des actions ou parts sociales est la procédure qui permet au créancier, disposant d’un titre exécutoire, de faire vendre ces valeurs mobilières et droits d’associés appartenant à son débiteur, et de récupérer alors sur le prix de vente la somme qui lui est due.

Or, en pratique, il n’est pas utile d’aller jusqu’à la mise en vente des titres car la saisie elle-même restreint tant les droits de l’associé sur ses titres qu’il aura hâte de payer sa dette et d’obtenir la main levée sur la saisie.

Intérêt de la saisie sur valeurs mobilières (actions ou parts sociales) par rapport à la saisie sur compte bancaire ou salaire pour recouvrer ses créances

Intérêt de la saisie sur valeurs mobilières (actions ou parts sociales) par rapport à la saisie sur compte bancaire ou salaire pour recouvrer ses créances

Il est fréquent qu’après un long combat judiciaire, le créancier, enfin muni d’un titre exécutoire, peine à se faire payer par le débiteur récalcitrant et voit ses tentatives d’exécution, généralement par saisie-bancaire, échouer du fait d’une « soudaine » réorganisation patrimoniale de son débiteur.

Hormis le fait qu’il devient de plus en plus difficile de trouver les coordonnées bancaires de son débiteur, du fait notamment de la multiplication des comptes bancaires en ligne, le créancier poursuivant peut également voir son recouvrement menacé en raison d’une « disparition » de son débiteur (déménagement, démission, etc..).

Or, la généralisation de la transparence de la vie des affaires et l’émergence de sites donnant un accès public et gratuit aux actes et aux bénéficiaires effectifs des sociétés vient donner de nouveaux espoirs aux créanciers demeurés impayés.

Ainsi, le créancier peut désormais aisément connaître la situation nouvelle de son débiteur, devenu associé ou actionnaire d’une société.

Modalités de la saisie sur actions ou parts sociales

Le créancier va pouvoir pratiquer une saisie entre les mains d’un tiers, autre que la banque ou l’employeur de son débiteur. A savoir, la société émettrice d’actions ou de parts sociales, dont son débiteur est propriétaire.

Concrètement, la saisie va s’opérer par la signification à la société (dont le débiteur est associé ou actionnaire) d’un acte de saisie des titres, lequel sera ensuite adressé audit débiteur.

Indépendamment de la valeur des titres saisis (laquelle peut être inférieur à celle de la créance), l’objectif véritable de cette mesure est de contraindre le débiteur à payer amiablement sa dette contre une mainlevée de la saisie pratiquée.

Car en effet, à défaut de paiement, le débiteur se verra empêché par cette saisie bénéficier  des résultats de la société dont il est associé ou actionnaire.

Effets de la saisie sur actions ou parts sociales

Le débiteur saisi continuera à exercer les droits non pécuniaires attachés à ses parts sociales ou actions. Il pourra ainsi continuer à exercer ses droits de participer aux assemblées, de prendre part au vote, d’obtenir la communication des documents destinés aux associés etc…

En revanche, une telle saisie aura pour conséquence de rendre indisponibles ses droits pécuniaires (en application de l’article R.232-8 du Code des procédures civiles d’exécution – CPCE) tels que les droits aux dividendes, aux réserves, au boni de liquidation.

Le débiteur saisi sera également privé des droits de souscription, d’attribution, de conversion ou d’échange d’actions.

Une telle indisponibilité des actions ou des parts sociales saisies engendrera ainsi une situation de blocage des projets de l’associé saisi et l’empêchera, par exemple, de vendre ou d’apporter ses titres ou encore de percevoir les fruits de son travail par une distribution de dividendes.

Ainsi, dans la mesure où le débiteur saisi est concerné par le sort des titres qu’il détient (tel est le cas lorsqu’il est l’associé majoritaire de la société et/ou lorsqu’il doit vivre des revenus que lui procure cette société), cette procédure doit mener le débiteur à trouver rapidement le moyen de désintéresser son créancier pour recouvrer une libre disposition de ses droits.

A défaut de parvenir à cette finalité, le débiteur saisi dispose d’un mois à compter de la signification de l’acte de saisie pour procéder lui-même à la vente des titres (en application de l’article R.221-30 du CPCE sur renvoi de l’article R.233-5) et payer son créancier.

Passé ce délai, la vente des titres saisis s’effectuera sous forme d’adjudication (en application de l’article R.233-5 du CPCE) à l’initiative du créancier.

Mais l’objectif du créancier demeure d’éviter de parvenir à cette adjudication (qui peut apparaitre difficile à mettre en œuvre en pratique et n’intéresser que peu d’acquéreurs potentiels) et de monnayer une mainlevée de la mesure d’exécution entreprise.

A noter enfin que la procédure ci-avant décrite doit respecter un formalisme très précis, faute de voir le débiteur saisi engager une action en nullité de la mesure devant le juge de l’exécution.

Notamment, la saisie doit être effectuée par la signification au tiers saisi d’un acte qui contient à peine de nullité certaines mentions (les nom et domicile du débiteur, l’indication du titre exécutoire en vertu duquel la saisie est pratiquée, la sommation de faire connaître l’existence d’éventuels nantissements ou saisies…) et le débiteur devra être informé de la saisie par acte d’huissier de justice dans un délai de huit jours, à peine de caducité de la saisie.

Cet acte d’huissier de justice comprendra également centaines mentions légales et ce, à peine de nullité de l’acte.

Le Cabinet DAHAN Avocats vous conseille et vous accompagne dans la stratégie procédurale à adopter pour l’exécution de vos titres de Justice et le recouvrement de vos créances.